Le RCEP en Inde : profit garanti pour les transnationales de l’industrie laitière, montée de la résistance paysanne | Lait de Normandie... et d'ailleurs | Scoop.it
Le RCEP, accord de libre-échange entre 16 pays asiatiques (Partenariat économique régional global), dont des producteurs géants comme la Chine, doit réduire à zéro les taxes à l’importation sur les biens, agricoles comme industriels.
 Comme il s’agit de l’accord commercial le plus important du monde, il aura un impact sur la moitié de la population mondiale, dont 420 millions de petites fermes familiales qui produisent 80% de l’alimentation de l’Asie.
Les agriculteurs indiens rejettent cet accord, car le lait est un pilier de leur subsistance et la pauvreté des revenus est depuis longtemps le drame de la vie des agriculteurs indiens.
Un des secteurs de l’agriculture indienne au moins, le secteur national des coopératives laitières, a réussi à créer un modèle qui a réalisé le rêve de Gandhi. Il assure la subsistance de 150 millions de paysans. Les petits paysans, principalement des femmes, se sont rassemblés dans un modèle coopératif fédéré sur trois niveaux et peuvent vendre du lait, ne serait-ce qu’un litre, à la coopérative qui le récupère et le commercialise dans le pays.
Ce modèle coopératif partant de la base a créé les marques nationales de lait qui sont populaires en Inde, comme Amul, et plus de 170 000 coopératives laitières (NDDB, 2016). C’est certes un modèle qui implique peu d’intrants et de faibles rendements, mais il a contribué à multiplier par quatre la production de lait indienne, l’amenant en position de tête au niveau mondial, tout en soutenant la subsistance de millions d’Indiens.
Pour les femmes rurales, posséder des bêtes équivaut à avoir un contrat d’assurance et une source stable, ô combien précieuse, de revenu journalier et de nourriture pour la famille.
Les entreprises comme Fonterra considèrent aujourd’hui le RCEP comme un moyen de forcer l’entrée dans cet immense marché indien des produits laitiers. Fonterra a ouvertement déclaré que le RCEP lui servirait de levier pour ouvrir des marchés clés qui sont actuellement protégés comme celui de l’Inde, où il serait en concurrence directe avec la coopérative indienne Amul. C’est pourquoi beaucoup de gens craignent que les petits producteurs laitiers indiens n’en soient réduits à travailler pour Fonterra ou à faire faillite. Ils ne seront pas en mesure de résister.
La tendance générale à la montée des initiatives privées en matière de produits laitiers en Inde a eu pour résultat un environnement ultra-compétitif où les acteurs privés comme les coopératives laitières se sont lancés dans une guerre des prix pour capturer des parts de marché.
Pour les petits producteurs, le lait a atteint des prix extrêmement bas. En réalité le secteur privé est en pleine expansion en Inde. Selon des sources issues de l’industrie, il n’a fallu au secteur privé que 20 ans pour dépasser la part du marché acquise par le secteur des coopératives laitières sur plus d’un demi-siècle.
Des pays-membres du RCEP, comme le Japon et l’Australie, se servent des normes de sécurité sanitaire pour bloquer les importations des petits producteurs laitiers des pays en développement comme l’Inde.
Compte tenu du climat explosif et de la colère qui monte inexorablement chez les agriculteurs, lassés de toujours avoir la portion congrue, le gouvernement Modi se doit d’empêcher le RCEP de détruire les moyens de subsistance en milieu rural.