Les métabolites spécialisés de champignons, aussi appelés métabolites secondaires, sont de petites molécules ayant des activités très diverses. Certaines d’entre-elles ont des applications médicales qui ont révolutionné la médecine moderne (antibiotique tel que la pénicilline, anticholestérol tel que la lovastatin, immunosuppresseur pour la transplantation d’organes tel que la ciclosporine).
En réponse aux stress d’origine biotique, les plantes sont capables de percevoir le stress et d’activer des voies de défenses leur permettant de limiter voire supprimer les effets néfastes de ce stress. Les champignons pathogènes sont l’une des sources de stress biotique. Dans une étude publiée dans Journal of Experimental Botany des chercheurs ont pu mettre en évidence que Colletotrichum higginsianum, l’agent pathogène responsable de l’anthracnose des crucifères, produit un métabolite spécialisé capable d’inhiber la mise en place des défenses de la plante. Grâce à des approches mêlant purification par bioguidage et l’emploi de lignées rapportrices d’Arabidopsis thaliana, il est apparu que le mode d’action de l’higginsianin B est l’inhibition de la voie de défense des jasmonates. Plus particulièrement, ce métabolite spécialisé est capable d’empêcher la dégradation du répresseur (protéine JAZ) de cette voie de signalisation par le protéasome de la plante. Des tests ont par la suite confirmé que l’higginsianin B inhibe les activités catalytiques du protéasome que ce soit in vivo ou in vitro. Des inhibiteurs du protéasome sont actuellement évalués dans la lutte contre certains cancers et l’higginsianin B pourrait être à l’origine d’un futur traitement de ce type.
Le consortium à l’origine de ces découvertes rassemble des équipes de 5 grands instituts européens : l’UMR BIOGER (INRAE, AgroParisTech, Saclay Plant Sciences), ICSN (CNRS, Gif-sur-Yvette), Leibniz IPB (Halle, Allemagne), MPIPZ (Cologne, Allemagne) et Université d’Athènes (Grèce).
Légende Figure : Racines d’Arabidopsis exprimant une protéine fluorescente jaune fusionnée au répresseur JAZ de la voie de défense des jasmonates. La protéine chimérique s'accumule dans les noyaux des cellules végétales. Suite à l’ajout de jasmonate (MeJA) le répresseur est dégradé et la voie activée, les noyaux ne sont plus jaunes. Un pré-traitement à l’higginsianin B empêche la dégradation de la protéine chimérique malgré l’ajout de MeJA, les noyaux restent jaunes. D'autres molécules structurellement similaires ne sont pas capables d'inhiber la dégradation du répresseur.
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Life Sciences UPSaclay